Essentielle : une touche de féminité dans les médias malgaches

Essentielle : une touche de féminité dans les médias malgaches

Un jour dans mon média est une série de témoignages, qui illustre chaque semaine le quotidien de personnes travaillant dans les médias de l'Afrique, du monde arabe et de l'Asie du Sud-Est, accompagnés par CFI.

Cette semaine, entretien avec Haingo Willie Rarivoson, rédactrice en chef du magazine Essentielle.


Essentielle est un magazine féminin lancé en septembre 2012. Ce mensuel de 76 pages appartient au groupe de presse L'Express. Il est composé de quatre radios, d'une chaîne de télévision et de cinq publications dont L'Express, le titre phare du groupe.

Après être passée par plusieurs médias malgaches dont la chaîne MBS, Haingo Willie Rarivoson est d'abord recrutée comme responsable d'édition avant de devenir rédactrice en chef du magazine Essentielle.

Un ton libre et décomplexé

Le journal emploie six femmes journalistes, un infographiste et un photographe. Haingo Willie Il y a aussi de plus en plus de jeunes femmes de 13 à 19 ans qui nous lisent, sans doute attirées par les rubriques mode. revendique un ton décomplexé, différent de ce qui est pratiqué dans les autres médias du pays : "Nous pouvons dire que nous participons à l'amélioration de la condition de la femme malgache. Nous n'hésitons pas à aborder des sujets tabous", déclare t-elle. Le mensuel s'adresse à des femmes de 30 à 45 ans.

L'équipe de rédaction travaille dans un local dédié au magazine : un open-space au siège du groupe L'Express situé à Antananarivo, dans le quartier des affaires Ankorontdrano. Les sujets développés par le mensuel sont choisis au cours d'une conférence de rédaction. Chaque journaliste rédige ensuite son article. Haingo Willie s'assure du respect de la politique éditoriale et envoie les documents au secrétariat de rédaction. Après leur validation, l'infographiste et le photographe interviennent pour les illustrer. Puis une dernière révision des textes est réalisée avant la maquette.
C'est ensuite sur l'île Maurice que les 6500 exemplaires sont imprimés, puis acheminés par bateau ou par avion à Madagascar : "Le travail d'impression y est moins cher et de bien meilleure qualité", relève la rédactrice en chef. Ils seront ensuite envoyés dans les différents points de distribution.
Les publicités à l'intérieur du magazine garantissent une certaine autonomie financière mais guère plus, "le mensuel génère peu de bénéfices", confie-t-elle.
Essentielle est vendu à moins d'un euro l'unité.

Le papier, un medium encore prisé à Madagascar

À Madagascar le papier a encore beaucoup de succès : "Notre magazine est imprimé sur du papier glacé, il est agréable à feuilleter. Les annonceurs locaux privilégient toujours ce format traditionnel." Nous travaillons à la mise en place d'une stratégie numérique.
Les articles sont progressivement intégrés au site internet mais le manque de ressources humaines ralentit le processus de mise en ligne.

Le magazine possède une page Facebook comprenant 7200 abonnés qui lui sert surtout pour communiquer et interagir avec le lectorat. À ce sujet, Haingo Willie révèle que le projet Médias 360° de CFI a été d'une grande aide : "Nous avons eu un déclic : on a réalisé le potentiel du numérique, mais également notre retard. Au début, par exemple, nous n'aimions pas du tout Twitter. Puis nous avons vu que ce réseau social peut être une vraie source d'informations, c'est plus rapide. Médias 360° nous a poussés à aller plus vite et le suivi de CFI nous oblige à faire cette transition de manière plus sérieuse", explique-t-elle.

À Madagascar, les patrons de presse sont soit des politiciens, soit des opérateurs économiques

Le paysage médiatique malgache est marqué par une forte présence de politiciens et d'hommes d'affaires à la tête des groupes de presse. L'Express n'y échappe pas : "Notre PDG fait de la politique mais il sait ce qui peut ternir la crédibilité d'un média. Il reste donc généralement à distance du traitement de l'information", témoigne Haingo Willie. La principale difficulté qu'elle rencontre est de ne pas être considérée comme une "vraie journaliste" parce qu'elle travaille dans un média féminin : "Pour beaucoup de gens, c'est une histoire de filles et de vernis. Il y a beaucoup de préjugés et il va falloir que ça change", continue-t-elle, déterminée.

D'une façon générale, être journaliste dans le pays est rendu difficile par la pauvreté des informations ou leur indisponibilité, sans oublier "les menaces et représailles". Quant aux Malgaches, ils choisissent les médias en fonction de l'information qu'ils veulent avoir : "S'ils veulent se renseigner sur l'opposition, ils lisent les médias publics ; et s'ils cherchent des informations sur la gestion du pays, ils liront les médias privés."

En plus de consolider sa transition numérique, Essentielle veut contribuer à rehausser les standards du métier de journaliste à Madagascar : "Nous voulons diversifier l'offre médiatique et encourager une liberté de ton", conclut-elle.

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